Google place l’expérience mobile en avant au détriment de la publicité

Google et le mobile

La question de la navigation sur mobile a été soulevée il y a désormais plusieurs années de cela par les géants d’Internet, et notamment par Google. Toujours prompt à mettre en avant les sites responsives, c’est-à-dire les sites dont les formats sont adaptés pour les trois grands types de consultation que sont le desktop, les tablettes et les smartphones, le géant de Mountain View se dirige depuis l’été vers le confort de lecture des utilisateurs mobiles.

Mobile-first et premières incursions vers l’expérience utilisateur

Le premier décret tombe durant l’été. Une nouvelle norme est créée : l’AMP, soit l’acronyme d’Accelerated Mobile Pages. Une norme majoritairement technique à la visée unique : fluidifier jusqu’à une volonté d’instantanéité la navigation sur mobile en rendant quasi-nul le temps de chargement entre le clic sur un lien de recherche google et l’affichage effectif du contenu.
Le dispositif attire de nombreux médias anglophones. Slate, Wired, Gizmodo ou le Washington Post l’adopte et louent des taux de rebonds en baisse et des utilisateurs qui reviennent plus fréquemment. Comme toujours, Google n’hésite pas à récompenser les premiers utilisateurs de leur nouvelle technologie et affichent, uniquement sur mobile, les sites optimisés en AMP en priorité dans un encart dédié. Soit un espace d’exposition inespéré dans un SERP (Page de Résultats d’un Moteur de Recherche) toujours plus concurrentiel.

Début novembre, officialisant une autre de leur « expérimentations » dont les rumeurs couraient depuis plus d’un an, Google annonce que leur algorithme de classement de résultats naturels de recherche, jusque là séparé entre mobile et desktop, se réunirait progressivement en un ranking général. Plus important : tout comme une bonne partie des frameworks CSS (Bootstrap, Foundation…), les résultats seraient triés en mobile-first, soit la priorité donnée au classement mobile, même sur desktop.

Logique avec le constat qu’une écrasante partie des requêtes de recherche enregistrées par Google provienne de mobile. De surcroît, les statistiques mondiales montrent que, pour la première fois en octobre 2016, la combinaison mobile + tablette a dépassé le desktop en qualité de premier medium de consultation d’Internet sur une période mensuelle complète.

Google dit stop aux publicités intrusives sur mobile

Alors que ces premières officialisations n’impliquaient pas, selon Google, les webmasters à effectuer de profondes modifications sur le contenu de leur site, voilà que l’entreprise décide de charger à fond et d’asseoir encore un peu plus leur vision de l’expérience utilisateur. Pour autant, celle-ci, à appliquer d’ici le 10 janvier 2017 avant son instauration définitive, risque de faire des heureux parmi les lecteurs.

En effet, Google va progressivement déclasser les sites mobiles, même responsives, qui affichent des publicités bloquant l’intégralité ou une grande partie de l’écran du smartphone ou de la tablette de l’utilisateur. En présage, terminées, les pop-ups impossibles à fermer, où un clic mal placé vous emmène vers l’obscure page d’un site e-commerce mal famé. Aux oubliettes, les publicités interstitielles, couvrant une partie de l’écran ou forçant un scroll trop prononcé pour continuer la lecture du contenu d’origine.

Pour autant, Google n’a pas volonté à devenir un tyran de l’affichage mobile et prévoit quelques exceptions à ces règles. Les encarts légaux, comme pour l’utilisation des cookies ou la vérification de l’âge de l’utilisateur, ne seront pas proscrits de cette interdiction. De même, les bannières publicitaires respectant une prise d’espace minimum sur l’écran seront tolérées. Aux annonceurs d’être le plus concis et malins possible, en utilisant des mots-clefs spécifiques et réfléchis, pour inciter au clic dans un espace extrêmement restreint.

Doit-on réinventer et identifier un modèle publicitaire ?

Sans la possibilité d’outrepasser leurs résultats organiques mobiles puisque l’excuse du ranking desktop a disparue, forcés de constater l’évolution constante et quasiment exponentielle, depuis quelques années, des visiteurs mobiles et tablette, les sites soucieux de leur stratégie SEO vont devoir redoubler d’efforts. Les mesures de Google signent la fin définitive de toute velléité de contenus aux rabais sur la version mobile, opposée au contenu complet exclusif au desktop. De l’autre côté du miroir, l’internaute est heureux, lui qui peut enfin contrôler la lecture de son contenu sans interruption publicitaire, interne ou externe.

Pour les sites web dont l’affichage publicitaire constitue une source de revenus annexe et dispensable, le changement sera surtout d’ordre esthétique. Pour les autres, médias et structures professionnelles dont la rentabilité d’un site est un enjeu de tous les instants, la transformation risque d’être bien plus longue – et surtout, plus insidieuse. La publicité constituant l’écrasante, si ce n’est la totale source de revenus de ces entreprises web là, elle ne sera bien évidemment pas sujette à disparition mais à transformation. Son avenir, si les restrictions d’espace publicitaires persistent, réside dans le publipostage, ou la rédaction de contenus commerciaux mélangés aux espaces rédactionnels traditionnels et impartiaux.
Leur utilisation est déjà courante dans les rédactions, où son signalement est légalement obligatoire mais bien souvent réduit à la plus simple forme d’avertissement – une ligne, un encart ici, ou un code couleur par là. Autant dire, peau de chagrin, puisque l’identification d’un contenu publicitaire ainsi dissimulé est très mal perçu par les internautes, qui y perçoivent souvent une trahison éditoriale. Dans ce contexte de méfiance du grand public envers les médias, le procédé fait tâche.

En exagérant dans le pessimisme, on peut se demander quel sort est réservé aux entreprises culturelles ou des petites entreprises de communication, bientôt en proie à la mainmise de leurs annonceurs et à la soumission d’un brand content qui n’aura plus rien de naturel, ni d’objectif. Sans tomber dans la dystopie, l’avenir est flou sur la forme qu’adoptera à l’avenir la publicité. Tout aussi opaque, sa confusion avec les espaces de rédaction naturels. À moins que Google, dans un nouvel effort d’instigation d’expérience utilisateur, ne parvienne à instaurer des règles claires quant à cette démarcation. À la manière de la séparation entre résultat organique et référencement payant sur sa page de recherche.